Mathieu Bock-Côté reçoit Simon-Pierre Savard-Tremblay pour parler de son livre L’État succursale: La démission politique du Québec (Boréal, 2016)
Premier invité de l’année 2017 : Guillaume Rousseau, juriste et professeur à la Faculté de droit de l’Université de Sherbrooke. Au programme : Droit et politique dans le monde contemporain.
Rares sont ceux qui croient encore à la mondialisation heureuse. De l’immigration massive au capitalisme global en passant par la peur suscitée par l’islam radical, on semble de nouveau vivre sous le signe du tragique et du conflit. D’ailleurs, un peu partout, partout, on se révolte contre elle en votant pour ceux qui, de belle ou moins belle manière, plaident pour le retour aux frontières ou la renaissance des identités nationales. Qu’on pense à la victoire du Brexit ou à celle de Donald Trump ou encore à la poussée des mouvements populistes en Europe mais aussi, au simple surgissement de la question identitaire un peu partout en Occident, c’est une vaste insurrection qui semble prendre forme. Qu’est-ce qui alimente ces révoltes? Comment les expliquer? Pour en parler, je recevrai Simon-Pierre Savard-Tremblay, auteur de L’État succursale (VLB, 2016) et Martin Lemay, essayiste.
Le gaullisme est certainement une des plus grandes aventures politiques du vingtième siècle. Le parcours du général de Gaulle permet de réfléchir au rôle des nations, à celui de l’histoire, à celui de la volonté, et à la possibilité qu’a l’homme de façonner son destin contre ce qui semble être le poids de la fatalité. Dans le cadre de cette émission de La vie des idées, je rencontrerai Christophe Tardieu, haut-fonctionnaire français et fin observateur de la vie politique, pour parler de l’héritage et de l’actualité du gaullisme.
Le Québec a longtemps été catholique. En fait, il semblait indissociable du catholicisme. Avec la Révolution tranquille, les choses se sont renversées. L’identité québécoise s’est détachée du catholicisme. Les liens que l’on croyait consubstantiels entre le peuple québécois et la religion catholique se sont rompus. Et le catholicisme, autrefois dominant, est devenu au mieux patrimonial, et peut-être même résiduel. Le catholique pratiquant est une créature rare au Québec, et pourtant, cette créature existe encore. Quel lien les catholiques entretiennent-ils aujourd’hui avec l’identité québécoise? Sont-ils gardiens d’une de ses dimensions fondamentales mais occultée? Sont-ils devenus étrangers à une nation dans laquelle ils ne se reconnaissent plus? Représentent-ils notre mauvaise conscience, sont-ils témoins d’une religion qui nous manque? Et que peuvent-ils apporter dans notre société, au-delà de leur seule foi, aussi essentielle soit-elle pour eux? Ces questions, je les poserai ce lundi à La vie des idées, au 91,3 fm, à deux catholiques pratiquants. Le premier, Benoit Patar, est un éminent philosophe et un spécialiste de la philosophie médiévale. Le second, Alex La Salle, est un jeune écrivain qui collabore notamment au magazine Le Verbe, dont il est certainement une des plumes les plus remarquables. Au plaisir de vous savoir à l’écoute !
Depuis plusieurs années, le cours ECR suscite les querelles publiques les plus vives. Quelle est sa mission au juste? On ne parvient jamais vraiment à l’identifier. S’agit-il simplement d’un cours visant à transmettre une culture religieuse aux jeunes générations? S’agit-il plutôt d’un cours visant à promouvoir un certain idéal de tolérance et d’ouverture dans un monde marqué par la diversité? À moins qu’il ne s’agisse d’un cours faisant une promotion active du multiculturalisme auprès des jeunes générations, au nom de la déconstruction des préjugés culturels des uns et des autres? Chose certaine, on s’y oppose vivement, même si ceux qui luttent contre lui le font souvent pour des raisons contradictoires. Pour mieux comprendre cette querelle, je recevrai ce lundi à La vie des idées (Radio VM, 91,3 FM, de 11h à 12h) Patrick Andries, qui est animateur du site Pour une école libre, et Daniel Baril, qui vient de publier en collaboration avec Normand Baillargeon un ouvrage collectif ayant pour titre La face cachée du cours Éthique et culture religieuse (Léméac, 2016).
Quand j’étais jeune militant souverainiste, mes collègues et moi répétions avec insistance que la loi 101 avait été victime d’une entreprise de déconstruction, et pour cela, nous voulions la restaurer, lui redonner sa première vigueur. On pensait confusément aux concessions en matière de langue d’affichage autant qu’à la normalisation généralisée d’un bilinguisme d’État officieux. Mais jamais nous n’avions idée de l’ampleur de cette déconstruction. C’est que le juriste Éric Poirier n’était pas encore passé par-là et qu’il n’avait pas encore publié son livre capital, La Charte de la langue française : ce qu’il reste de la loi 101 quarante ans après son adoption, qui vient de paraître aux éditions du Septentrion. Dans ce livre majeur, dans cet ouvrage capital, Éric Poirier nous montre et nous raconte comment la loi 101 a été mutilée juridiquement et politiquement depuis 40 ans. C’était une loi avec de grandes ambitions. Est-ce qu’elle a été fidèle à sa promesse? Est-ce qu’elle porte encore le projet d’un Québec français? Que reste-t-il de la loi 101? J’aurai le grand plaisir d’en parler avec lui aujourd’hui à La vie des idées, à Radio VM, 91,3 fm, de 11h à 12h.
Vendredi soir, la tendance s’est maintenue et confirmée : Jean-François Lisée a été élu chef du PQ. En début de course, on présentait sa participation à la course comme une candidature de témoignage. Il est pourtant parvenu à s’imposer en s’emparant de la question interdite entre toutes : celle de l’identité québécoise. Certains ont vu dans sa victoire une révolte des membres du PQ contre l’establishment. Dès le soir de son élection, toutefois, Philippe Couillard a lancé contre Lisée une charge sévère, en l’associant aux mouvements d’extrême-droite européen, une accusation qui n’est pas neuve de la part du chef du Parti libéral. L’heure est venue de faire le bilan de cette course et de voir où en est rendu le Parti Québécois et où en sont rendus les souverainistes. Pour parler de cette question fondamentale, je reçois deux figures intellectuelles majeures associées au mouvement national. D’abord, Jacques Beauchemin, professeur en sociologie à l’UQAM et auteur de nombreux livres, parmi lesquels, récemment, La souveraineté en héritage. Ensuite, Robert Laplante, le directeur de la revue L’Action nationale.
Marc Crapez est une figure singulière de la science politique française. Historien des idées et politologue, il est l’auteur de nombreux ouvrages d’une grande originalité et d’une érudition époustouflante. Dans les premiers, La gauche réactionnaire et Naissance de la gauche, il proposait une nouvelle généalogie du clivage gauche-droite dans un pays qui a l’habitude de le croire éternel et inaltérable. Il a aussi mené d’autres recherches, notamment sur l’antisémitisme de gauche et le phénomène des bulles idéologiques. Et tout récemment, il publiait deux nouveaux ouvrages. Dans le premier, Éloge de la pensée de droite, il propose, comme le titre l’indique, un éloge d’une droite sure d’elle-même. Dans le second, Je suis un contrariant, il revient sur son parcours intellectuel et les grands thèmes qui ont habité et habitent encore sa réflexion. Aujourd’hui, à La vie des idées, c’est un immense plaisir de le recevoir pour parler de la situation de la France à la veille de l’élection présidentielle de 2017.
En 2015, Christian Saint-Germain publiait L’avenir du bluff québécois (Liber, 2015), un pamphlet aussi brulant que violent où il faisait le procès de l’impuissance politique des souverainistes québécois. Le livre, qui s’est diffusé comme un samizdat, a trouvé son lectorat : chez les souverainistes, on cherche à comprendre les causes profondes de l’échec de l’indépendance. Ces jours-ci, il publie un nouveau pamphlet, Le mal québécois (Liber, 2016) tout aussi combattif, où il poursuit son procès du Parti Québécois et explore en profondeur le désir de disparaître qui hante la culture québécoise. Dans le cadre de cette émission de La vie des idées, je l’ai invité pour parler de son nouveau livre en compagnie de David Leroux, qui signera une recension de cet ouvrage dans le numéro d’octobre de L’Action nationale.
Le rapport des Québécois à la France a beaucoup évolué à travers l’histoire. Longtemps mère-patrie adorée et regrettée, elle fut aussi accusée d’avoir abandonné les Québécois à eux-mêmes pendant deux siècles. Depuis cinquante ans, la relation entre nos deux pays s’est transformée : les retrouvailles ont eu lieu. Pourtant, certains Québécois, attirés par le mythe de l’américanité, ont déserté mentalement ce qu’on appelle les vieux pays pour se tourner vers les États-Unis. Ils peuvent même aller jusqu’à mépriser la France, en la regardant avec une étrange condescendance. D’autres demeurent fidèles à une relation privilégiée, soit pour des raisons politiques, soit pour des raisons culturelles, en rappelant que la France est irremplaçable pour le Québec. Qu’en est-il aujourd’hui de notre rapport à la France? Pour parler de cette question fondamentale, je recevrai l’historien Éric Bédard et l’écrivain Carl Bergeron.
Mercier ! Le grand Mercier ! Longtemps, on l’a considéré comme le plus grand homme politique de l’histoire du Québec. Et aujourd’hui, même si les Québécois ignorent globalement leur passé d’avant 1960, le nom de Mercier surnage. On l’associe encore, même sans trop savoir pourquoi, à un moment positif de l’histoire du Québec. Pour la première fois depuis la confédération, le Québec renouait avec un nationalisme d’affirmation. Mais que savons-nous de lui? Claude Corbo, une grande figure du monde académique québécois, vient de publier coup sur coup deux livres à son sujet. Dans le premier, il a rassemblé ses discours politiques, un exercice qui n’avait pas été fait depuis la fin du XIXe siècle. Il fait précéder le tout d’une substantielle introduction. Dans le second, il imagine ce qu’aurait pu être l’autobiographie d’Honoré Mercier. Chose certaine, il remet ce grand personnage au cœur de notre vie publique. Je recevrai Claude Corbo pour nous parler de Mercier dans la première émission de la deuxième saison de La vie des idées.
Jean-Philippe Trottier est une figure bien connue de l’équipe de Radio VM, où il anime l’émission du midi depuis plus de six ans. Mais c’est aussi un écrivain et un philosophe à la réflexion aussi profonde que subtile. Dans le cadre de ce dernier épisode de la saison de La vie des idées, ce sera l’occasion de mieux la connaître ou de la découvrir.
La vie politique, depuis toujours, tourne autour de la question des grands hommes. Peuvent-ils faire l’histoire? Sont-ils capables d’infléchir le destin d’une nation? Est-ce qu’un homme avec une immense volonté peut renverser ce qui semble être une tendance historique lourde? Cela nous oblige à réfléchir aux sentiments et aux passions qu’il peut réveiller au service de son action. Cela nous oblige aussi à réfléchir à la place que les historiens lui réservent dans le monde d’aujourd’hui. À travers cette question, c’est celle de la liberté humaine dans l’histoire qui se pose. Ces questions, nous les aborderons dans le cadre de cette nouvelle édition de La vie des idées avec l’écrivain et documentariste Carl Leblanc et avec l’historien Éric Bédard.
Le Parti Québécois a longtemps été le véhicule historique et politique du projet souverainiste. La démission toute récente de Pierre-Karl Péladeau, que plusieurs associaient à la dernière chance de l’indépendance à court terme, l’oblige à se poser des questions difficiles : est-il encore capable de mener le combat souverainiste ? Doit-il en faire sa priorité ? Comment rassembler les nationalistes dispersés dans les autres partis politiques ? La chose est-elle même possible ? Pour poser ces questions, et bien d’autres, je recevrai Jean-François Daoust et David Leroux, deux jeunes intellectuels qui ont proposé ces derniers jours des analyses contrastées sur la question.
Demain, la post-humanité ? La post-humanité a longtemps été un thème de science-fiction. Mais il arrive que celle-ci anticipe sur l’histoire à venir, et aujourd’hui, la post-humanité occupe à la fois la sociologie et la philosophie politique : à travers elle, ce sont les fondements de la cité qui sont questionnés de manière radicalement nouvelle. Mais à quoi la post-humanité réfère-t-elle au juste? À la figure du cyborg? À la marchandisation du corps? À l’ingénierie génétique? À l’utopie de l’immortalité? À une nouvelle régulation technologique des corps et des âmes? Ces termes, pour le commun des mortels, demeurent assez nébuleux. On sent toutefois se dessiner une société où la vie serait créée en laboratoire, où on pourrait vaincre la vieillesse, et peut-être même la mort. Une telle société est-elle envisageable et désirable? Savons-nous encore poser des limites à l’utopie d’une manipulation complète de la vie et du monde par la technologie? Est-ce que l’homme, aujourd’hui, est tenté de se prendre pour Dieu? Céline Lafontaine, professeure au département de sociologie de l’Université de Montréal est une spécialiste internationalement reconnue de ces questions, et j’ai l’immense plaisir de m’entretenir avec elle dans le cadre de La vie des idées.
L’immigration et l’intégration font débat au Québec comme ailleurs. Dans quelle mesure doit-on consentir au principe de l’immigration massive? Et comment réussir l’intégration des immigrants qui sont déjà là et de ceux qui se joindront à nous? Autrefois, on disait: à Rome, on fait comme les Romains. Mais que se passe-t-il quand les Romains ne veulent plus faire comme les Romains et se perçoivent comme un groupe parmi d’autres à Rome? Autrement dit, l’immigration s’est complexifiée dans nos sociétés, et l’intégration s’est complexifiée aussi. Il nous faut absolument y voir plus clair. C’est de cela dont nous parlerons aujourd’hui à La vie des idées. Comment devient-on Québécois? C’est la question que pose Akos Verboczy dans Rhapsodies québécoises, un très beau livre qu’il a fait paraître plus tôt cet hiver aux éditions du Boréal. Il est avec nous aujourd’hui. Je reçois aussi Tania Longpré, enseignante en francisation, qui publiait en 2013 Québec cherche Québécois, aux éditions Stanké.
Les secrets de l’exercice du pouvoir La politique donne souvent l’impression d’être un spectacle, un grand théâtre. Elle l’est. Avec elle, on met en scène les passions collectives et on permet aux passions de s’investir dans la cité. Mais on sait aussi qu’il y a un arrière du décor, même si nous y avons rarement accès. C’est le lieu des conseils difficiles, des décisions nécessaires mais invivables. Dans son Journal politique, Dominique Lebel, qui a accompagné Pauline Marois lors de son passage au pouvoir de 2012 à 2014, a fait le pari de nous en apprendre un peu plus sur l’exercice du pouvoir, ses contradictions et ses déceptions.
La nostalgie a mauvaise réputation. C’est qu’elle contredit la modernité dans sa croyance inflexible dans le mythe du progrès : demain sera mieux qu’hier. Ceux qui nuancent cette affirmation sont rapidement accusés de complaisance réactionnaire. Ils se loveraient dans le mythe du bon vieux temps et entretiendraient le fantasme de l’âge d’or. Pour cela, ils nous empêcheraient d’apprécier pleinement les vertus et mérites du monde nouveau dans lequel nous évoluons aujourd’hui. Et pourtant, la modernité est traversée par ce qu’on appellera le sentiment de la perte. Obstinément, certains penseurs cherchent à le comprendre sans nécessairement en faire le procès. On sent, confusément, que la modernité a été chèrement payée. Qu’en est-il du respect dû aux vieilles vertus, comme l’honneur, la fidélité, le sens de la tradition. Qu’en est-il de nos vieilles croyances? Étaient-elles intégralement à rejeter? Qu’en est-il de la transmission culturelle et des institutions qui en avaient la responsabilité? L’école, par exemple, en cessant de transmettre un patrimoine de civilisation à un enfant appelé à se grandir en se l’appropriant, pour célébrer, désormais, le potentiel créatif d’un petit individu ne devant jamais se sentir écrasé par la tradition, a changé de mission. Mais est-ce vraiment pour le mieux? En un mot : avons-nous le droit, aujourd’hui, de faire l’éloge de la nostalgie? Ne sommes-nous pas en droit de réclamer un certain héritage oublié? Mais lequel, et comment ? Pour parler de cette très vaste question, je recevrai lundi le 4 avril à La vie des idées Émile Robichaud, figure immense du monde de l’éducation au Québec depuis cinquante ans et Alex La Salle, écrivain et essayiste, qui collabore activement au magazine Le Verbe dont il est certainement une des plumes les plus intéressantes et flamboyantes.
Longtemps considéré comme un des historiens les plus importants du Québec, et même comme un des artisans de la renaissance nationale québécoise dont il fut l’ouvrier inlassable, Lionel Groulx (1878-1967) a été victime, depuis une vingtaine d’années, d’une campagne de diffamation posthume. Celui que René Lévesque avait qualifié « d’éveilleur national » et de « clairon vivant », en le présentant comme « ce Québécois dont la victoire principale fut de redonner assez de fierté à assez de Québécois pour qu’on doive le tenir pour l’un des principaux semeurs de la moisson d’avenir qui lève aujourd’hui au Québec » a été caricaturé en idéologue inquiétant au parfum sulfureux dont il faudrait se tenir loin. Qu’en est-il vraiment? Comment passe-t-on, en quelques années, d’inspirateur à repoussoir? Peut-on encore tirer profit d’une relecture de Groulx, ou doit-on au mieux le considérer comme une figure définitivement désuète, n’ayant plus rien à dire sur notre condition collective? Groulx serait-il, contre toute attente, un des inspirateurs de la Révolution tranquille? Quelle vision avait-il de la question nationale et de l’indépendance du Québec? L’historien et professeur au Collège militaire de Saint-Jean Charles-Philippe Courtois est un des meilleurs spécialistes de Lionel Groulx aujourd’hui. Il travaille actuellement à sa biographie et a signé, tout récemment, une remarquable préface à la nouvelle édition de L’appel de la race, son plus célèbre roman, rééditée chez Fides. Je le recevrai lundi le 21 mars, pour parler de l’actualité de Lionel Groulx.
Il y a quelques jours, la ministre de la condition féminine, Lise Thériault confessait, à la stupeur généralisée, ne pas être féministe. Comment la chose pouvait-elle être possible? Ils furent plusieurs à la dénoncer, en l’accusant de ne tout simplement pas comprendre ce qu’était le féminisme et d’entretenir à son endroit des préjugés suspects, venus d’un autre temps. Pourtant, la question se pose : faut-il obligatoirement être féministe? Est-il nécessaire de l’être si on veut se mêler des affaires publiques? La grande révolution de l’égalité a-t-elle eu lieu, est-elle en train de se passer, ou est-elle encore à faire? Chose certaine, le féminisme, aujourd’hui, est multiforme et ne se laisse pas enfermer dans une seule définition. Entre le féminisme laïciste au cœur de la bataille pour la Charte de la laïcité, il y a quelques années, et le nouveau féminisme surtout occupés par les questions liées à l’identité de genre, il y a de grandes différences et on est en droit de se demander ce qu’ils peuvent bien avoir en partage. Et ce n’est là qu’une distinction parmi d’autres dans une famille de pensée traversée par de nombreux débats. Dans le cadre de cet épisode de La vie des idées, c’est à un état des lieux des grandes controverses du féminisme contemporain que nous nous occuperons. Pour en parler, je recevrai Judith Lussier, chroniqueuse, auteure, animatrice et militante féministe, et Sébastien Bilodeau, intervenant psychosocial, candidat à la maîtrise en travail social et collaborateur à la revue L’Action nationale.
Plus de cinquante ans après sa mort, dans l’imaginaire historique québécois, Maurice Duplessis joue encore le rôle de repoussoir politique et moral. C’est contre la philosophie qu’on lui prête que s’est construit le Québec moderne, et plus encore, ce qu’on appelle le grand récit de la Révolution tranquille. Duplessis serait une figure absolument irrécupérable. Nul ne peut se réclamer de certaines parties de son héritage sans se voir disqualifié politiquement et transformé en réactionnaire infréquentable. D’ailleurs, encore aujourd’hui, pour discréditer certaines idées politiques, on les associe au fondateur de l’Union nationale. Et pourtant, Martin Lemay, ancien député péquiste de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vient de transgresser ce tabou historico-politique en se portant, dans son dernier livre, À la défense de Maurice Duplessis (Québec-Amérique, 2016). Selon lui, Duplessis a été injustement diabolisé et nous devons redécouvrir son bilan et son héritage. Je le recevrai à La vie des idées. Notre mémoire du régime Duplessis est-elle déformée? Quelle était la nature du nationalisme du chef de l’Union nationale? Comment expliquer sa très mauvaise réputation depuis 50 ans? Était-elle méritée, et si oui, pourquoi? Avec lui, pour parler de ces questions, je recevrai aussi l’historienne Lucia Ferretti, professeure à l’Université du Québec à Trois-Rivières, qui a publié en 2010, en collaboration avec Xavier Gélinas, un ouvrage collectif ayant pour titre Duplessis, son milieu, son époque (Septentrion, 2010).
Souvent, lorsqu’on s’intéresse à la société québécoise à l’étranger, deux grandes questions reviennent : le Québec sera-t-il un jour souverain, et pourquoi le catholicisme s’est-il effondré aussi brutalement dans les années 1960 alors qu’il avait longtemps été hégémonique? Cet effondrement ne cesse de provoquer l’étonnement. Et c’est cette deuxième question sera au cœur de notre discussion. À travers elle, c’est tout un pan de notre histoire que nous pourrons revisiter. Comment expliquer qu’une société qui communiait autrefois dans le catholicisme au point d’en faire la religion nationale et qui s’était confiée aux autorités religieuses soit aujourd’hui autant passionnée par une quête de laïcité que certains voudraient transformer en politique d’extinction du fait religieux? Avions-nous vraiment la foi, autrefois? Sommes-nous aujourd’hui absolument fermés au fait religieux, où sommes-nous plutôt attirés par les spiritualités exotiques, qui ne sont pas marquées au fer rouge de la tradition? Quel rapport les Québécois entretiennent-ils aujourd’hui avec leur héritage catholique en particulier et avec le fait religieux en général? Voilà autant de question que je poserai à Mathieu Bélisle et Jean-François Laniel, mes invités pour cette nouvelle édition de La vie des idées. Le premier est professeur au collège Jean-de-Brébeuf et membre du comité de rédaction de la revue L’Inconvénient. Le second est candidat au doctorat en sociologie à l’Université du Québec à Montréal, membre du comité de rédaction de la revue Argument et est cofondateur du journal Le Relève.
On aime croire que les droits de l’homme représentent l’horizon moral indépassable de notre temps. Ils seraient consignés dans de grandes chartes qui viendraient donner un nouveau fondement à la démocratie occidentale et on ne saurait remettre en question leur souveraineté sans témoigner d’une forme de nostalgie autoritaire qui viendrait remettre les institutions communes au service de majorités hégémoniques et répressives. Pourtant, plusieurs s’inquiètent de ce qu’ils appellent le gouvernement des juges, qui étoufferait la vie démocratique et nous ramènerait sans le dire au temps du despotisme éclairé, qui s’exercerait au nom du progrès diversitaire. Qu’en est-il exactement ? Est-il possible d’éclairer cette controverse ? Quelles conceptions de la démocratie s’affrontent à travers cette controverse ? Qui est l’homme dont les droits de l’homme se veulent gardiens ? Quelles conceptions du peuple sont en jeu à travers cette querelle ? Pour débattre de cette question fondamentale, au coeur de la philosophie politique contemporaine, je recevrai Guillaume Rousseau, professeur à la Faculté de droit de l’Université de Sherbrooke, qui a développé, au fil des ans, et dans de nombreux articles, une critique de la judiciarisation du politique, et Frédéric Bérard, enseignant en droit à l’Université de Montréal, qui a signé, en 2014 un livre, La fin de l’État de droit (XYZ, 2014) où il s’inquiétait des critiques de plus en plus nombreuses adressés à la philosophie des droits de l’homme.
Les souverainistes ont longtemps cru qu’ils allaient dans le sens de l’histoire, et qu’il suffisait d’être patient pour atteindre l’indépendance du Québec. Un jour viendrait où le destin du Québec s’accomplirait et où son peuple se constituerait en État souverain. Cet optimisme est assez rare, aujourd’hui. Une question hante le mouvement national : et si l’indépendance avait échoué? Les intellectuels souverainistes multiplient les ouvrages pour comprendre ce qui ressemble de plus en plus à un échec, même s’ils ne parviennent pas à faire leur deuil, ou s’y refusent, tout simplement, car en politique, rien n’est jamais définitif, même si personne ne niera l’existence de tendances lourdes. Parmi ces intellectuels, Jacques Beauchemin et Christian Saint-Germain ont signé, ces derniers-temps, deux livres majeurs. Le premier, dans La souveraineté en héritage (Boréal, 2015), un ouvrage aussi poignant que mélancolique, médite sur le sens de l’inachèvement historique que représente l’avortement du projet d’indépendance. Le second, dans L’avenir du bluff québécois (Liber, 2015) se montre particulièrement incisif à l’endroit des élites souverainistes et du grand récit du Québec moderne qu’ils répètent sans cesse pour masquer aux Québécois la réalité de leur condition. Je les recevrai avec grand bonheur à La vie des idées pour une discussion franche et ouverte sur l’état de la question nationale québécoise. Où en sommes-nous? Que nous est-il permis d’espérer? Voilà deux questions, parmi d’autres, que je leur poserai.
On dit souvent que le Québec a non seulement perdu la foi, mais le sens du sacré. Notre nation ne sait plus trop quoi faire de sa vieille religion, de ses anciennes croyances, des rites qui longtemps, ont permis à nos pères et nos mères d’apprivoiser les différents stades de l’existence. C’est évidemment vrai, même si on ne doit pas négliger la passion compensatoire pour les spiritualités exotiques qui occupent un espace vide. Pourtant, des artistes semblent encore traversés par les grandes préoccupations spirituelles. J’en recevrai deux lors de cette nouvelle rencontre de La vie des idées. La première, Stéphanie Chalut, est une artiste en arts visuels, qui cherche notamment, à travers ses œuvres rassemblées dans sa dernière exposition Testament, à renouer avec les racines françaises et catholiques du Québec. La seconde, Léolane Kemner, signe Trente deniers, un surprenant thriller religieux, qui se plonge dans l’histoire du christianisme, pour la revisiter à partir d’un de ses plus grands parias, Judas le traître. Ces deux démarches sont contradictoires: l’une va au cœur de la tradition, l’autre va dans les marges qui la contredisent. Elles puisent pourtant dans la même intuition: la création a à voir avec le sacré et c’est souvent en puisant dans les sources spirituelles de notre civilisation et dans sa mythologie fondatrice qu’on peut peut-être le mieux raconter son histoire. À tout le moins, la religion demeure une énigme qui mérite qu’on y accorde une véritable réflexion.
Carl Bergeron est écrivain. Il vient de publier aux éditions du Boréal un livre absolument singulier, Voir le monde avec un chapeau, sous la forme d’un faux-journal, qui est une longue méditation sur la culture québécoise et peut-être surtout, sur sa part d’ombre. S’agit-il d’une culture qui libère et qui permet d’accéder pleinement à l’expérience humaine ou d’une culture dont on se libère? S’agit-il d’une culture qui peut alimenter une quête existentielle ou qui a tendance à l’étouffer? Ces questions sont bien étrangères au Québec contemporain, qui s’imagine absolument libéré, absolument moderne, absolument délivré de ses vieilles pathologies. Nous nous les poserons avec l’auteur ainsi qu’avec Bruno Lalonde qui, de sa librairie, Le livre voyageur, observe depuis plus de vingt ans les Québécois dans leur rapport au livre et à la culture. Je m’attends à un échange absolument fascinant entre ces deux esprits qui observent la culture québécoise loin de ses institutions les plus officielles et qui pourtant, ont plus à nous dire sur elle que plusieurs savants accrédités.
Marc Chevrier est politologue, juriste et historien des idées. Professeur au département de science politique de l’Université du Québec à Montréal, c’est un des intellectuels québécois qui a développé une philosophie politique aussi que subtile, qui ne se laisse pas enfermer dans les catégories simplificatrices qui dominent la vie médiatique. C’est aussi un observateur particulièrement perspicace de la société québécoise. Dans cet entretien d’une heure, nous parlerons à la fois du rôle de la philosophie politique dans une société et des grands enjeux qu’elle devrait aborder, de la vie intellectuelle au Québec et de sa situation politique actuelle.
Puisque cette émission s’intéressera à la vie des idées, j’ai trouvé naturel de commencer cette émission avec un homme qui joue un rôle majeur dans l’animation intellectuelle de la société québécoise. Robert Laplante est directeur de la revue L’Action nationale et des Cahiers de lecture de L’Action nationale, qui fêtera bientôt ses 100 ans. Figure intellectuelle majeure du mouvement indépendantiste, c’est aussi un connaisseur intime de la société québécoise, de son histoire et de ses réalités les plus méconnues. Il est l’auteur de Ce qui cherche à naître, de Chroniques de l’enfermement et de Guyenne, une des seules études véritables de l’histoire tragique de la colonisation, au Québec.