On dit souvent que le Québec a non seulement perdu la foi, mais le sens du sacré. Notre nation ne sait plus trop quoi faire de sa vieille religion, de ses anciennes croyances, des rites qui longtemps, ont permis à nos pères et nos mères d’apprivoiser les différents stades de l’existence. C’est évidemment vrai, même si on ne doit pas négliger la passion compensatoire pour les spiritualités exotiques qui occupent un espace vide. Pourtant, des artistes semblent encore traversés par les grandes préoccupations spirituelles. J’en recevrai deux lors de cette nouvelle rencontre de La vie des idées. La première, Stéphanie Chalut, est une artiste en arts visuels, qui cherche notamment, à travers ses œuvres rassemblées dans sa dernière exposition Testament, à renouer avec les racines françaises et catholiques du Québec. La seconde, Léolane Kemner, signe Trente deniers, un surprenant thriller religieux, qui se plonge dans l’histoire du christianisme, pour la revisiter à partir d’un de ses plus grands parias, Judas le traître. Ces deux démarches sont contradictoires: l’une va au cœur de la tradition, l’autre va dans les marges qui la contredisent. Elles puisent pourtant dans la même intuition: la création a à voir avec le sacré et c’est souvent en puisant dans les sources spirituelles de notre civilisation et dans sa mythologie fondatrice qu’on peut peut-être le mieux raconter son histoire. À tout le moins, la religion demeure une énigme qui mérite qu’on y accorde une véritable réflexion.